L’ADN synthétique, la nouvelle mémoire de l’humanité

L’ADN synthétique, la nouvelle mémoire de l’humanité

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Ces derniers jours, une nouvelle a fait la une de plusieurs magazines culturels. Il s’agit à priori de musique, mais à plus forte raison c’est de mémoire, de stockage et de pérennité de la création humaine qu’il est question.

 

Des morceaux de musique anthologiques seront désormais stockés sur de l’ADN synthétique. Le premier est celui du virtuose de la trompette, un musicien hors pair, que les qualificatifs peinent à décrire, j’ai nommé Miles Davis et son morceau Tutu, joué en live lors du Montreux jazz festival en 1986.

 

L’autre morceau est une chanson du groupe de rock britannique Deep Purple. C’est toujours d’un live joué à Montreux qu’on parle. La chanson est Smoke on the water, le live date de 1972.

Un pas vers l’immortalité, car le stockage sur de l’ADN synthétique préserve les informations pour des siècles nous dit-on.

C’est une première, rapporte le site Pitchfork qui indique qu’à l’origine de l’initiative se trouve la start-up Twist Bioscience, Microsoft et l’université de Washington.

Ainsi, la mémoire de la musique, du festival et des musiciens sera à jamais inscrite dans celle de l’humanité.

 

Mais qu’est-ce que l’ADN synthétique ?

 

En 1953, Watson et Crick révolutionnent le monde de la biologie en découvrant la structure de l’ADN. L’autre révolution est arrivée plus tard avec l’annonce de la création de l’ADN synthétique.

L’ADN synthétique est une molécule créée à partir de données numériques et de chromosomes nés chimiquement puis placés dans une cellule bactérienne receveuse.

 

Ainsi, en 2010, Mycoplasma mycoides fut, grâce aux travaux de Craig Venter et de son équipe.

« Nous avons décidé dès le début que nous devions prendre un chemin synthétique bien que personne ne l’ait fait avant, pour voir si nous pourrions synthétiser un chromosome bactérien, afin de pouvoir en fait varier le contenu en gène pour comprendre les gènes essentiels pour la vie. C’est comme ça qu’a débuté notre quête de 15 ans pour arriver ici » a-t-il déclaré au TED en 2010.

Craig Venter affirme qu’une équipe de l’université de Pennsylvanie a étudié pendant 2 ans les risques de créer une nouvelle espèce en laboratoire. Il affirme que des discussions à échelle scientifique et politique ont été menées et qui ont fini par aboutir à la publication des travaux. Car il va sans dire que la modification du génome entraîne souvent de larges débats et de vives polémiques autour de l’éthique de ces recherches.

« C’est peut-être un changement philosophique géant dans la façon dont nous considérons la vie » avait encore dit Venter.

 

Depuis 2010, les recherches ont évolué crescendo, elles ont donné de l’espoir à la médecine, mais pas que. Les progrès biotechnologiques ont permis d’entrer en profondeur dans la composition de l’ADN chimique (synthétique) révélant la grande capacité de stockage de ses macromolécules. Cette propriété a ouvert la porte à de nouvelles avancées technologiques en matière de stockage de données à long terme, des communications sécurisées, etc.

 

En 2013, les premières tentatives d’encodage de données numériques sur de l’ADN synthétique ont commencé à donner leurs fruits. Une équipe de l’université de Cambridge a réussi à stocker une photo HD, un discours de Martin Luther King, les sonnets de Shakespeare sur 115 000 brins, les données restituées étaient 100 % correctes. Les scientifiques utilisent d’abord un langage informatique trinaire, transformé en chaîne ACTG ensuite, puis chimiquement synthétisé. Le mathématicien américain Leonard Adleman avait relevé en 1994 la similitude entre l’univers binaire de l’informatique qui utilise les chiffres 0 et 1 et celui génétique qui utilise les bases A, C,t et G (adénine, cytosine, thymine et guanine). Il avait même trouvé le moyen de traduire un langage en un autre.

 

En 2016 Microsoft a acheté « 10 millions de brins d’ADN synthétique, personnalisés chez la société Twist Bioscience » rapporte le site Bigdata.

Et en janvier 2017, les médias parlent de nouvelles avancées considérables comme l’encodage de 200 mégaoctets d’informations en molécules biologiques, toujours par Microsoft.

 

Dernièrement c’est de musique que l’on parle en évoquant l’ADN synthétique pour montrer au monde l’importance de ces nouvelles technologies. Une capacité de stockage énorme, dans une quantité infime d’ADN. L’équivalent d’un grain de sable pourrait contenir des giga-octets d’informations pour une durée de quelques siècles. La mémoire de l’humanité est sauvée, sans parler du goût musical des générations futures qui écouteront du Miles Davis en live.

Une solution pratique qui économise l’espace et l’énergie, mais qui reste assez onéreuse pour le moment.