Kamel Daoud, les mots sur nos maux

Kamel Daoud, les mots sur nos maux

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« Je rêve donc d’être Tunisien, chez moi, dans ma rue, avec mon pays derrière le dos et les quarante voleurs en face de moi et de les encercler et de les obliger de baisser les prix, puis les yeux, puis la tête, puis les bras puis de les entendre me dire qu’ils vont partir, redonner le pays à ses martyrs et me laisser moi et mes enfants vivre ici, même si je dois manger mes chaussures en guise de repas et mes ancêtres pour recharger mon courage. J’en rêve. » Écrit par Kamel Daoud le 15 janvier 2011 dans le Quotidien d’Oran.

 

Très controversé, admiré par certains et détesté par d’autres, objet d’une fatwa contre lui en 2015, une chose est sûre, Kamel Daoud ne laisse personne indifférent. Le printemps arabe, l’islam, la burqa, etc. Aucun sujet de polémique ou de discorde n’a échappé à la plume courageuse de l’écrivain.

 

L'éternel amoureux de la liberté

 

Né à Mostaganem en 1970, il a grandi chez ses grands-parents dans un petit village qu’il décrit en ces mots : « À partir de 17 heures, nous avions le choix entre nous pendre ou prier ». Enfant, il s’est pris de passion pour la lecture, il dévorait les livres et c’est peut être ce qui a fait le contrepoids l’aidant à faire une rupture avec l’attrait mystique vers la religion musulmane qu’il a connu à l’adolescence. Cet intérêt pour la religion avait évolué plus tard, l’amenant à suivre les enseignements des frères musulmans, à plusieurs reprises, dans des sortes de « campings » pédagogiques qui duraient plusieurs mois à chaque fois. Amoureux éternel de la liberté, son choix est fait : « La religion est un transport collectif. Moi, je préfère aller vers Dieu seul et à pieds. » Fait-il dire à Meursault dans son roman. Ainsi fut-il !

 

Le chroniqueur et le romancier

 

C’est celui qui a donné une identité à l’arabe de l’« Étranger » de Camus, dans « Meursault, contre-enquête », son premier roman traduit dans une trentaine de langues, décrochant un immense succès auprès des lecteurs et couronné par le prix Goncourt du premier roman en 2015. Ses positions politiques, publiées dans le Quotidien d’Oran dans la chronique « Raïna Raïkoum » depuis 20 ans, sont connues pour être tranchées, claires et parfois virulentes. Ses articles sont souvent repris par la presse française, et publiés dans Le Monde, Libération, Courrier International et Le Point. Une sélection de ces chroniques publiées entre 2010 et 2016 ont été rassemblées en un recueil paru aux Actes Sud sous le titre de « Mes indépendances ».

 

Kamel Daoud n’a jamais caché sa sympathie pour la Tunisie et pour le peuple tunisien. Il est celui qui, le lendemain de la révolution tunisienne, sort un article publié dans Le Monde, intitulé : « je rêve d’être Tunisien », dans lequel il ne mâche pas ses mots et rêve d’« être Tunisien en Algérie ».

 

Il sera l’invité de la librairie Mille Feuilles jeudi 30 mars, et de la Foire Internationale du Livre de Tunis le 1er avril, pour présenter son dernier ouvrage paru aux éditions Cérès, et qui porte le même titre de sa fameuse chronique du 17 janvier 2011, « Je rêve d’être Tunisien ».