10 ans jour pour jour après sa mort, Jean François Bizot, fondateur d’Actuel et de Radio Nova fascine toujours autant. Hommage.
« De notre côté, juste après mai 68, on avait deux solutions. Soit se battre frontalement pour faire la révolution façon Lénine/Mao, soit se dire : pendant qu’ils font ça, on va s’occuper de la culture. Et changer la tête des gens. »
Difficile de trouver une citation qui résume le Pape de l’underground français Jean-François Bizot. Mais celle-là tient la route. C’était en janvier 2002, dans une interview qu’il accordait à Philippe Manœuvre, le rédacteur en chef de Rock & Folk pour parler d’un ouvrage monumental qui allait paraître : Underground, l’anthologie du magazine Actuel.
10 ans après sa mort, l’héritage est aussi lourd que fascinant : un fils d’industriels qui dédie (dilapide pour le commun des mortels) son héritage à la presse libre, underground. Citoyen du monde, citoyen tout court, il avait dédié sa vie à libérer le verbe, à inventer une nouvelle presse loin des codes de l’école du journalisme : Écrire sur ce que l’on aime, partager, anticiper les courants musicaux, faire jaillir la lumière de l’avant garde. C’était la mission du magazine actuel.
Bizot ne faisait rien comme les autres, interview 24 h avec Serge Gainsbourg, il fallait y penser. Dépêcher un journaliste en Afrique tester une nouvelle plante hallucinogène. Partir à San Francisco rencontrer un auteur dépravé et totalement méconnu en Europe, et traduire son œuvre : tout comme Baudelaire qui avait traduit Edgar Allan Poe, Jean-François Bizot avait traduit Charles Bukowski.
Impossible de faire l’impasse aussi sur l’œuvre fondamentale de JFB : Il avait fondé la première radio alternative en France : Radio Nova. Grand collectionneur de disques, il a passé sa vie à dénicher les musiques du monde aux quatre coins du globe, le Grand Mix était né. Nova, c’était l’ouverture, les sons interdits de radio lâchés au ciel de Paris, et avec une constellation de personnages qui feront par la suite le bonheur de l’audiovisuel français, particulièrement ce que l’on appelle l’esprit Canal Plus : Philippe Vandel, Karl Zero, Jamel, Édouard Baer.
L’inclassable, le mot résume bien le personnage, c’est d’ailleurs le titre d’une biographie qui vient de paraître en France chez Fayard, par Marina Bellot et Baptiste Etchegaray. Il faudra aussi revenir à « Underground, l’histoire » paru en 2001 aux éditions Actuel/Denoël qui retrace l’aventure Actuel, ouvrage dans lequel cohabitent tous les héros de l'univers Bizot.