Il y aura sûrement un avant et un après Cambridge Analytica. La société de sondage et de stratégie a inversé la donne, et a provoqué un des plus grands scandales d’internet. Si les médias se sont surtout intéressés à Facebook et à Mark Zuckerberg, il reste difficile de cerner les acteurs de cette affaire et de se rendre compte de l’ampleur des dégâts. On parle d’influence, de fuite de données personnelles d’utilisateurs de Facebook. Des millions de personnes sont concernées par cette affaire qui fait échos à Edward Snowden et à Wikileaks. Des affaires qui font tache dans le monde du libre-échange et sans frontière d’internet.
1 - Cambridge Analytica : c’est quoi ?
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Année de la fondation de Cambridge Analytica : 2013
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Fondateurs : Robert Mercer/Alexandre Nix/Christopher Wylie (analyste)/Stephen Bannon.
- Motivation : C’est sûrement la partie la plus intéressante dans l’histoire de Cambridge Analytica. La motivation est loin d’être financière puisque Robert Mercer est milliardaire. Quand jusqu’à la dernière minute, le monde entier était sûr de la victoire d’Hillary Clinton en 2017, Mercer savait déjà que Trump allait devenir président. Tout cela part d’une rencontre entre Mercer et Peter Cadwell, analyste qui a identifié le courant anti-élite qui monte aux États-Unis bien avant tout le monde. L’analyse a tapé dans l’œil du plus que républicain Mercer.
2- Cambridge Analytica : c’est qui ?
Comme on venait de le dire, un nom se distingue dans ce chapitre de l’histoire, celui de Robert Mercer. Qui est-il ? Un simple milliardaire avec des convictions politiques de droite, si ce n’est d’extrême droite. Il est contre la politique environnementale, ouvertement climatosceptique et un soutien financier vital au parti républicain. Robert Mercer a soutenu à de nombreuses reprises le parti républicain à travers des fondations, ou l’organisation de dîners galas. On parle de fonds qui atteignent jusqu’à 8 millions de dollars. En résumé, Robert Mercer est un conservateur prêt à tout pour influencer les Américains, et faire triompher ses idées.
3-Cambridge Analytica et la politique :
La politique ! voilà un terrain que les milliardaires adorent, terrain de jeux pour les uns, aubaine pour les autres, Mercer n’a pas résisté. Si au début il se voulait discret dans ses donations aux partis et organisations de droite, aujourd’hui il assume. C’est lors de la campagne de Trump puis son élection que le nom de Mercer est remonté à la surface.
Brexit : la société est basée à Londres, elle est donc soumise aux lois européennes dans la protection des données. Avant que le scandale éclate, Cambridge Analytica a joué un rôle important dans le Brexit. Elle a travaillé avec le groupe « Leave » pro-Brexit, le Brexit est passé à seulement 2 % de différence avec les pros européens. La stratégie est simple : cerner la cible et la bombarder de message « Leave Eu », tout cela n’est possible que grâce aux données personnelles des internautes, ce qui permet aussi d’économiser des sommes importantes et ne pas s’éparpiller.
4- Les lanceurs d’alerte
C’est toujours la même histoire, celle de lanceurs d’alerte qui démasquent et dénoncent les travers d’internet. Cette fois, trois personnes ont joué un rôle important dont un qui a souhaité rester anonyme. Le plus médiatisé est sans doute Christopher Wylie, ex-directeur de recherche chez Cambridge Analytica, il a eu une tribune médiatique importante : New York Times, Libération, The Guardian. La raison qui l’a poussé à dénoncer la pratique de la firme est le remords. Le deuxième lanceur d’alerte est Shahmir Sanni, quant au troisième, personne ne le connaît. Le manque d’éthique de la firme a poussé Christopher Wyler à dénoncer les méthodes de l’entreprise. Dans une interview qu’il a accordée, il raconte l’environnement toxique dans lequel il a travaillé, et les réelles motivations des actionnaires.
Ce sont des entreprises très malines, qui exploitent le fait que les institutions sont encore peu développées dans ces pays, souvent riches de beaucoup de ressources naturelles. Pour moi, c’est ce à quoi ressemble le colonialisme moderne. SCL a fait bien plus d’argent après les élections que pendant : vous pouvez gagner de l’argent en aidant un parti à entrer au gouvernement, et en ayant ensuite une influence sur lui.
5- Facebook entre en jeu :
C’est à ce moment-là de l’histoire que Facebook devient un personnage dans le scandale. Aleksandr Kogan ne se doutait sûrement pas dans quoi il avait mis les pieds en acceptant d’être financé par CA. L’argent de Mercer investi dans cette application du chercheur de l’université de Cambridge n’était qu’un moyen d’avoir des données, de plus en plus de données, donc du pouvoir. Est-ce que Facebook se doutait de l’intention de la firme ? Oui, c’est ce que dit l’ex-directeur de recherche qui affirme la responsabilité de Facebook. Ce schéma est basé sur l’interview qu’il a donnée au journal Libération.
La suite, vous la connaissez, Mark Zuckerberg devant les sénateurs, perquisition dans les bureaux de Cambridge Analytica à Londres et médiatisation. La question des données personnelles est devenue urgente, surtout la manière dont nos données sont exploitées par Facebook, qui vit grâce aux pubs ciblées. L’ADN économique du réseau « gratuit » Facebook se base sur la vente des profils, informations et désirs de ses utilisateurs, ce qui a poussé le géant à aller encore plus loin dans sa manière de récolter des informations sur nous. Le problème n’est pas que ces données servent à vendre plus de vêtements ou de meubles, mais à influencer des électeurs en les manipulant.